D.1 Les matériaux du génie civil
D.1 Les matériaux du génie civil
Ce chapitre a pour objectif de présenter les particularités de ces matériaux dans la perspective d'une modélisation aux éléments finis. Parmi celles-ci, nous trouvons les principaux matériaux utilisés en génie civil (béton, bois, métal) en eux-mêmes mais aussi leur utilisation dans des structures.
1) Béton
Le béton est un matériau composite composé de granulats de diverses tailles et d’une pâte. Cette pâte constituée de ciment, d’eau et le plus souvent d'adjuvants, joue le rôle d’une colle (liant) entre les granulats. Le béton bien qu’hétérogène a su révolutionner le monde de la construction grâce à ses propriétés telles que sa souplesse d’emploi, sa moulabilité offrant une variété d’aspects (forme, teinte, texture), sa résistance mécanique, sa résistance au feu, son isolation acoustique et sa diversité (béton armé, béton précontraint, etc.).
Cependant, le béton est soumis à des processus de dégradation. Ces derniers peuvent être issus de sollicitations environnementales telles que l’humidité, la pluie, le froid, le gel-dégel, la chaleur, le vent, la sécheresse, d’agressions provenant de sels de déverglaçage, d’alcali-réaction, de réactions sulfatiques interne et externe ou/et de corrosion et de sollicitations mécaniques comme des chocs, l’augmentation de la charge. Selon le phénomène de dégradation, la détérioration de l’élément structurel est progressive, une fois la contrainte de traction du béton atteinte. Cette dégradation conduit à la coalescence de microfissures vers la formation de macrofissures et la localisation des déformations. L’augmentation de la déformation entraîne la chute de la capacité résistante du matériau ce qui montre un comportement adoucissant ou de softening qui se termine par la ruine de la structure.
Loi de comportement - Dans les calculs par éléments finis, on ne considère généralement que certains aspects du comportement du béton car, c’est un matériau complexe. Pour que la loi de comportement du béton soit la plus pertinente, il est nécessaire de bien comprendre le comportement et les propriétés du béton. De ce fait, non seulement il est essentiel de connaître non seulement le comportement de la pâte de ciment, mais aussi les granulats, qui donnent au béton ses propriétés de rigidité et de raideur. Elle est responsable des propriétés de résistance mécanique du béton. Grâce à l’eau contenue dans la pâte, elle est également la cause de ses principales défaillances telles que l’augmentation de la porosité, la diminution de la résistance mécanique, les effets différés (retrait, fluage) et le transfert d’agents agressifs.
Le béton est considéré comme un matériau quasi-fragile de par son comportement complexe. Les principales caractéristiques de comportement sont mises en évidence dans la littérature. La caractéristique la plus significative propre au béton est son caractère fragile en traction et plus ductile en compression et sujet aux phénomènes unilatéraux lors de cycles traction/compression. D’autres aspects sont à prendre en compte tels que les déformations permanentes et les effets hystérétiques liés aux frottements entre les lèvres des fissures lors de chargements cycliques. Certaines propriétés sont à considérer également comme le retrait et le fluage selon l’environnement et le chargement appliqué au matériau béton.
Dans la littérature, les deux principales approches pour modéliser le comportement du béton sont :
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Les modèles basés sur une approche continue. Cela veut dire que le béton est considéré comme un milieu continu (Bazant, 1979). Et pour tenir compte de la fissuration du béton, cette dernière est déduite de relations entre les déformations et les contraintes. Il existe les modèles élasto-plastiques (Ottosen, Drucker-Prager), endommageables (Mazars, Laborderie), à fissuration diffuse (smeared crack model), de type gradient et de type énergétique (fictitious crack model (Hillerborg, 1984), crack band model). Dans certains cas, des modèles élasto-plastiques sont utilisés mais l’utilisateur de ce type de loi doit être très prudent une fois la phase élastique dépassée car il est possible d’obtenir des déformations qui ne reflètent pas du tout le comportement du béton.
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Les modèles basés sur une approche discrète. En effet, la fissuration du béton engendre des discontinuités géométriques, et ces discontinuités sont intégrées entre les frontières des éléments connectés. Il existe les modèles discrets de Ngo, (Ngo, 1967), Bazant (Bazant, 1979), Blaauwendraad (Blaauwendraad, 1981), les modèles à éléments finis enrichis (E-FEM, X-FEM), (Belytschko, 1999) et également les modèles de type lattice.
Mais dans la littérature, les deux catégories de modèles les plus utilisées sont les modèles basés sur la mécanique de l'endommagement et les modèles considérant la présence de discontinuité explicitement.
Bien que la composante élastique ne soit pas exactement linéaire ([Baron] p.276 ; [Sargin 1971]), on effectue le plus souvent les calculs en adoptant l’élasticité linéaire isotrope (loi de Hooke) pour représenter la phase élastique du comportement du matériau béton. On adopte pour le module d’Young et le coefficient de Poisson des valeurs obtenues après caractérisation du béton. Dans le cas où il n’est pas possible de faire d’autres caractérisations mécaniques sur le matériau béton pour déterminer ses propriétés mécaniques actuelles, certaines de ses propriétés comme la résistance en compression peuvent être déduite à partir de lois-modèles que l’on trouve dans des codes-modèles comme l’Eurocode 2, par exemple.
Note - Les bureaux d’étude ne s’écartent de ce modèle que pour des études de détail, sur une partie de la structure, où des phénomènes mécaniques particuliers se sont manifestés : fissuration, réaction de gonflement, hétérogénéité locale. Il existe en effet des éléments finis de type « élément fissuré », des modèles d’endommagement, des lois viscoplastiques ou enfin des lois couplées poro-mécaniques ; mais il faut disposer, pour de telles études, de données issues de l’auscultation de l’ouvrage ou de prélèvements de béton pour s’orienter vers ces lois de comportement particulières, pour lesquelles il faudra de toute façon fixer plusieurs coefficients ou modules dans la préparation du calcul.
Modèle élastoplastique – De manière simplifiée, le béton est souvent modélisé comme un matériau élastoplastique homogène et isotrope, ce qui est, bien sûr acceptable tant que le béton ne fissure pas.
Vis-à-vis d’une loi élastoplastique, la fissuration du béton n’est pas directement modélisée : les zones de fissuration sont caractérisées par des déformations anélastiques importantes (>1-2‰) et un état de contrainte figé entre la résistance en traction ft et la résistance en compression fc du béton.
Comme on l’a vu au chapitre 3, une loi de comportement élastoplastique est composée d’une loi élastique et d’une loi d’écoulement plastique, associée à un « critère de plasticité ».
Le comportement post-fissuration peut néanmoins être représenté de façon approchée par une courbe σ-ε descendante au-delà de la résistance en traction. Celle-ci peut couvrir les effets de tension softening (représentant le travail nécessaire pour ouvrir la fissure) et les effets de tension stiffening (contribution du béton entre les fissures, contraint par l’adhérence à l’armature).
Si le comportement décroissant matériel conduit à un comportement décroissant global, il faut prêter attention à d’éventuels effets de localisation : la taille des éléments finis va limiter la taille des zones anélastiques et la solution va dépendre du maillage utilisé. Différentes techniques numériques permettent de résoudre ou limiter ce problème.
Endommagement - Une loi d’endommagement est une loi qui rend compte d’un des principaux effets macroscopiques de la fissuration du béton : la perte de raideur du matériau. L’idée fondamentale est de renoncer à suivre individuellement les fissures (leur apparition et leur propagation), et de considérer que le béton d’une structure périt plutôt par multiplication de fissures dans les zones dégradées. Ce type de loi permet donc de décrire la diminution de la rigidité du matériau sous l’effet de la création de micro-fissures dans le béton. Cette perte de rigidité est mesurée par une variable interne appelée endommagement, notée D, qui évolue de 0 (matériau sain) à 1 (matériau totalement endommagé) ; cette variable est généralement scalaire.
Afin de représenter au mieux le comportement du béton, les lois d’endommagement tiennent compte du comportement post-pic adoucissant. Cela permet de déterminer la contrainte de la manière suivante :
avec
Le mérite de cette approche est de considérer le béton comme un « milieu continu », cadre auquel la méthode des éléments finis est parfaitement adaptée.
Dans le cadre du comportement du béton, les deux principales familles de modèles d’endommagement sont les modèles anisotropes et isotropes. L'isotropie caractérise l’invariance des propriétés physiques du béton quelle que soit la direction. Alors que l’anisotropie est dépendante de la direction. Une loi anisotrope présente des réponses différences dues au chargement selon son orientation.
Un des modèles d’endommagement les plus utilisés dans le monde industriel et de la recherche est le modèle de Mazars [Mazars, 1984]. C’est certainement le premier modèle d’endommagement du béton fonctionnant de manière correcte.
Les principales difficultés posées par les modèles d’endommagement sont :
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une dépendance a priori des résultats au maillage : il convient en principe de démontrer que le mécanisme de ruine obtenu par ce type de modèle est indépendant de la finesse de maillage, au moins à partir d’un certain seuil. C’est d’ailleurs cette dépendance qui a amené au développement de méthodes de régularisation.
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l’absence de solution analytique dans des cas même simples.
Plusieurs classes de régularisation existent dont la régularisation non locale et la régularisation par l’énergie de fissuration [Hillerborg, 1976] (qui ne résout que partiellement le problème). Parmi les méthodes non locales, il est possible de citer les méthodes intégrales [Pijaudier et al., 1987], [Giry et al., 2011] ou les méthodes à gradient (gradient de déformations ou gradients de variables internes [De Borst et al., 1992], [Peerlings et al., 1996], [Nedjar, 2005], [Lorentz2017]. Ces méthodes nécessitent d’utiliser des maillages relativement fins ce qui les rend généralement très coûteuses en temps de calculs.
Effets différés et redistribution des contraintes - Dans l’étude du comportement d’un ouvrage en béton sur les semaines suivant le coulage du béton, mais surtout sur le long terme, il est nécessaire de tenir compte des effets différés tels que le retrait et le fluage.
Ces phénomènes propres au béton peuvent, en principe, être modélisés en adoptant une loi de comportement visco-élastoplastique (loi de Bingham), ou parfois même seulement viscoélastique (fluage « scientifique », [Eymard]) : cette approche est généralement mise en œuvre par les laboratoires de recherche, pour analyser les essais sur le matériau. Mais, dans le cas d’une modélisation plus fine tenant de ces effets différés, il est nécessaire d’intégrer des phénomènes tels que le séchage et la fissuration en plus du retrait et du fluage. Car tous ces phénomènes interagissent entre eux, d’où leur importance dans une modélisation numérique.
La déformation engendrée par le retrait est une déformation induite par le séchage du béton provenant des effets de l’environnement. Ce retrait induit une déformation différentielle du béton autrement dit des contraintes plus élevées aux zones à fort séchage. Ce phénomène engendre des contraintes de traction en surface entraînant la fissuration et des contraintes de compression en cœur.
Concernant le fluage, sa déformation est généralement décomposée en deux déformations, l’une due au fluage propre et l’autre au fluage de dessiccation. Cela vient du fait que le fluage dépend fondamentalement de l’humidité relative.
Dans l’Eurocode 2, il est possible de déterminer la déformation du béton due aux effets différés (sans chargement extérieur). Pour ce faire, il faut calculer la déformation du au retrait endogène (conséquence de l’humidité interne) et la déformation de dessiccation (conséquence du séchage et de la taille de l’élément structurel). Et la déformation de fluage sous contrainte de compression σc est égale, selon le §3.1.9 de l’EN1992-1-1 à :
où Ec est le module tangent (égal à 1,05 Ecm) et φ est le coefficient de fluage.
L’Eurocode 2 (EN1992-1-1) donne une méthode simplifiée de calcul de φ(∞,t0). L'annexe B donne une méthode plus complète permettant d'estimer φ(t,t0) ainsi que l'évolution du retrait (voir également l'annexe B de l'EN1922-2). De plus, il est important de retenir que le calcul des déformations différées fait intervenir le type de ciment.
2) Acier de charpente
Le comportement de l’acier est beaucoup plus simple que celui du béton, et cela pour plusieurs raisons : c’est un matériau isotrope, présentant des résistances et des modules identiques en traction et en compression. De plus, il fait l’objet de contrôles industriels qui assurent son homogénéité.
Modèles élastiques - Bien que l’acier se comporte essentiellement comme un matériau élastoplastique isotrope (Eurocode 3, partie 1.1, §5.4.3), les modélisations usuelles des structures acier, ou composites comportant de l’acier, adoptent pour ce dernier un comportement élastique linéaire. L’on vérifie a posteriori que la contrainte dans l’acier est inférieure à la limite élastique fy. Dans le cas d’éléments de type poutre ou poteau, les normes autorisent, si les sections présentent des dimensions assurant une ductilité locale suffisante, à dépasser dans l’analyse la résistance élastique et à considérer des moments résistants basés sur une distribution plastique des contraintes.
Élastoplasticité et écrouissage - La théorie de l’élastoplasticité s’est en fait développée à partir de l’étude des alliages acier, notamment en vue de prédire les efforts de laminage et de forgeage ([Hill], [Nadai]). Pour l’acier, le modèle usuel se compose de la loi de Hooke pour la déformation élastique, et du critère de plasticité dit « critère de von Mises », comme y invite d’ailleurs l’Eurocode 3 (partie 2, § 7.3 ; partie 1.5 §10 et partie 1.7 §5.2.3.2) : pour ce critère, il suffit de donner la contrainte de limite élastique fy de l’acier.
Du point de vue du calcul par éléments finis, il se pose encore la question de la prise en compte de l’écrouissage du matériau, c’est-à-dire de son durcissement dans la phase purement plastique. Cet aspect est notamment abordé à l’annexe C6, partie 1.5 de l’Eurocode 3. Dans un souci de vérification du modèle, il est sans doute préférable d’effectuer un premier calcul avec un modèle sans écrouissage : en effet, on peut alors vérifier la qualité des contraintes obtenues dans les zones plastiques en affichant les isovaleurs de la contrainte de von Mises (les zones plastifiées doivent être à peu près monochromes). Il est cependant à noter que l’usage d’une loi élastique parfaitement plastique, sans écrouissage, peut entraîner des problèmes de convergence de l’analyse non linéaire. En effet, les zones plastifiées présentent un module tangent nul et n’ont donc pas de raideur. La prise en compte de l’écrouissage permet de stabiliser la résolution numérique.
En cas d’écrouissage jusqu’à une contrainte de valeur fy+X, les décharges et recharges éventuelles se font élastiquement, avec un module égal au module initial. fy+X devient donc la limite d’élasticité apparente du matériau. Par ailleurs, le comportement de l’acier est proche du modèle d’écrouissage cinématique. En première approche, l’on peut considérer qu’un écrouissage en traction jusqu’à une contrainte (fy+X) entraîne une diminution de la limite d’élasticité en compression à la valeur fy-X, et vice versa.
Le modèle le plus courant pour l’acier est cependant l’écrouissage isotrope, dépendant de la déformation plastique cumulée :
Dans ce cas, il n’y a plus de distinction entre traction et compression et un écrouissage dans un sens de sollicitation entraîne une augmentation de la limite d’élasticité en compression. Cette hypothèse n’est donc valable que si le chargement considéré est monotone, et non cyclique.
Dans presque tous les codes de calcul, on peut afficher les isovaleurs de la déformation plastique cumulée : ainsi, il est possible de vérifier, dans les zones plastiques, que la contrainte de von Mises se répartit conformément à cette déformation.
Dans le cas particulier de l’acier inoxydable, l’hypothèse d’un comportement linéaire jusqu’à la limite d’élasticité conventionnelle fy, correspondant à une déformation plastique de 0,2 %, n’est pas respectée, et, comme le précise l’Eurocode 3-1-4, §4.2., il convient de prendre en compte les effets du comportement non linéaire en contrainte-déformation dans le calcul des flèches. La loi matérielle est de type Ramberg-Osgood, et des indications pour sa modélisation sont données par l’annexe C de cette partie de l’Eurocode.
3) Acier de précontrainte
Du point de vue du comportement, les aciers de câbles (haubans, suspentes) et les aciers de précontrainte ne diffèrent des aciers de charpente que par une limite élastique environ trois fois plus élevée (de 1680 à 2140 MPa en France), justifiée d’ailleurs par des sollicitations en service généralement supérieures à 1000 MPa. On peut donc, en première intention, modéliser les armatures de précontrainte comme des éléments à comportement élastique linéaire, ou à comportement élasto-plastique de type von Mises.
Les aciers de précontrainte sont tous laminés à chaud, et il y a donc lieu, en phase plastique, de prendre en considération une loi d’écrouissage linéaire isotrope. Le coefficient d’écrouissage h peut être calculé à partir des caractéristiques garanties par l’armaturier :
où Rm est la contrainte à rupture, fp0,1 la limite conventionnelle d’élasticité, E le module d’Young et Agt l’allongement à rupture.
Une conséquence directe de ce niveau de contrainte élevé est l’amorçage de mécanismes de relaxation. La relaxation des aciers est un effet différé (dépendant essentiellement du temps écoulé depuis le chargement), donc non-élastique. Elle se traduit, pour une barre ou un câble soumis à un allongement constant, par une baisse progressive de la contrainte. Ce mécanisme ne s’amorce, à la température ambiante, que pour un allongement dépassant environ 60 % de la limite élastique (soit environ 1000 MPa). La relaxation augmente sensiblement avec la température.
Comme pour le fluage des bétons, on peut modéliser la relaxation avec une loi de comportement visco-élastique linéaire ; toutefois, cette approche est plutôt réservée aux travaux de recherche. En règle générale, il n’est pas courant de modéliser les aciers de précontrainte : on se borne souvent à introduire l’action de la précontrainte par une distribution de forces réparties à travers les éléments en béton. Cependant, pour des analyses de détail, où l’on s’intéresse à l’interaction entre les câbles et le coulis d’enrobage, on peut prendre en compte la relaxation par un calcul incrémental en temps, où les pertes de relaxation sont introduites comme des contraintes initiales.
4) Acier passif
Action mécanique normale des aciers passifs - Dans les calculs par éléments finis, les aciers passifs sont fréquemment modélisés par des éléments linéaires, c’est-à-dire unidimensionnels, de type « barre ». Suivant les principes des règlements de béton armé historiques, on considère en effet que les armatures agissent principalement en reprenant les tensions et compressions du béton suivant leur axe propre, et c’est précisément ce que permet le modèle d’élément fini de barre. L’accrochage aux nœuds des éléments massifs représentant le béton permet, au demeurant, d’éviter les mécanismes propres aux assemblages de barres seules.
Dans la plupart des codes de calcul, les éléments de barre sont considérés, par défaut, comme des éléments à comportement élastique linéaire. Étant donné le caractère unidimensionnel de ces éléments, on a donc une loi du type N = E A u/L, où u est le déplacement axial, et N l’effort normal aux nœuds. Il faut vérifier a posteriori que la contrainte axiale N/A reste comprise entre ±fy.
Adhérence - Ce qui précède ne vaut, bien sûr, qu’à la condition qu’il y ait adhérence continue entre les armatures passives et le béton.
5) Bois
Le bois est un matériau qui présente quelques singularités : il n'est pas homogène et ceci à différentes échelles, il n'est pas isotrope, il ne présente pas de comportement symétrique, il peut présenter des ruptures ductiles ou fragiles selon la sollicitation et son orientation. Le bois est sensible à l'humidité, ce qui a un impact sur ses caractéristiques dimensionnelles et sur sa raideur et sa résistance. La durée de chargement a un impact important sur la résistance et la déformée des éléments en bois ; les variations d'humidité peuvent accélérer ces déformées (mécanosorption). Sur la base de ce constat, on peut asseoir un raisonnement pour aborder une modélisation par la méthode des éléments finis.
Homogénéisation - L'hypothèse doit être validée sur le volume élémentaire représentatif, a minima, le volume du plus petit élément fini. En sachant que, selon les essences, les cernes de croissance peuvent dépasser 1 cm, il deviendra problématique d'assumer cette hypothèse d'homogénéisation à proximité des organes d'assemblages (pointes, broches, boulons…) qui présentent un diamètre de cet ordre de grandeur, voire plus faible.
La présence de nœuds est rarement prise en compte dans les modélisations de structure ou d'éléments de structure.
Orthotropie - Le bois présente une structure et des caractéristiques fonction de trois directions, la direction longitudinale – l'axe du tronc – le fil du bois, les directions radiales et tangentielles, perpendiculaires à la direction longitudinale. Ces dernières s'inscrivent dans un plan, souvent celui des sections droites de poutres, sur lequel apparaît plus ou moins nettement les cernes de croissance. Le repère d'orthotropie est donc un repère quasi cylindrique, alors que le repère des éléments s'inscrit plutôt dans un référentiel cartésien. La représentation de cette orthotropie, quand elle est prise en compte, se limite dans la grande majorité des cas à une hypothèse d'isotropie transverse (axes radial et tangentiel à caractéristiques identiques) dans un référentiel cartésien. La pente de fil associée à la présence de nœuds n'est en général pas prise en compte dans le calcul des éléments. Par contre, elle est modélisée dans le calcul des assemblages, notamment pour les assemblages par contact.
La matrice de souplesse (inverse de la matrice de rigidité) peut être définie comme suit pour un cas plan orthotrope :
Remarque : L’hypothèse d’orthotropie et de symétrie de Sij réduit le nombre de termes indépendants de 36 (cas 3D le plus général) à 9 termes.
Bois – hypothèse orthotrope
Modélisation élastique - Il suffit de disposer de la matrice de comportement isotrope transverse pour une modélisation 2D ou 3D. Les modules entre les directions longitudinale et radiale ou tangentielles peuvent présenter des rapports de l'ordre de 20. Ils évoluent en fonctions de la durée de chargement (fluage), de l'humidité du bois à la mise en œuvre et de son évolution dans le temps (environnement). La représentativité du résultat MEF dépendra de la pertinence des paramètres pris en compte.
Modélisation plastique, critères de rupture - Pour une matériau isotrope transverse non symétrique, on peut s'orienter vers des critères de Hill, de Tsai… en sachant qu'il sera nécessaire de décrire la rupture fragile, en traction perpendiculaire et en cisaillement. La grande variabilité des résistances rend le calage des paramètres des critères délicat. La succession de cernes de croissance, ou celle des lamelles assemblées, avec des caractéristiques mécaniques différentes, peut rendre un modèle homogène difficile à caler en termes de résistance. En effet, la résistance et la rigidité sont fortement corrélées pour le bois et des effets « système » apparaissent rapidement en termes de résistance d'élément. Ainsi, on dispose de limites de résistance en traction longitudinale, en compression longitudinale, en flexion…
Enfin, les structures en bois sont particulièrement sensibles au comportement de leurs assemblages. Ceci peut présenter l'avantage de ne pas avoir à modéliser finement les éléments, mais à s'intéresser plus précisément aux zones d'assemblages. Par contre, apparaissent les problématiques de contacts, de matériaux multiples, de la plastification de certains, de rupture fragile d'autres, des limites d'homogénéisation rappelées précédemment.
Il apparaît clairement que l'effort de modélisation est lié à l'échelle d'investigation, ou au stade du projet. Sous réserve de prise en compte des singularités listées ici, la modélisation du bois au sein d'une structure peut être menée comme pour un autre matériau.
Modélisation des effets différés et de l’interaction avec les phénomènes hydriques - Le bois est un matériau hygroscopique sensible au changement d’humidité relative de l’air. Il est par ailleurs sujet à des effets de fluage sous contrainte. Si l’on désire modéliser ces phénomènes, l’on peut adopter un modèle de type viscoélastique vieillissant en environnement variable, en accord avec les principes de la thermodynamique. Le modèle de comportement viscoélastique de type Kelvin-Voigt généralisé, caractérisé par des paramètres rhéologiques vieillissants et dépendant du niveau et de l’histoire de l’humidité peut être associé au modèle de comportement non-viscoélastique de Ranta-Maunus pour caractériser le retrait-gonflement et la mécano-sorption.
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